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Le point sur les réseaux hospitaliers locorégionaux

L’obligation de rejoindre un réseau locorégional

Depuis le 1er janvier 2020, chaque hôpital a l’obligation de faire partie d’un « réseau locorégional », c’est-à-dire d’une collaboration :

  • dotée de la personnalité juridique, durable et juridiquement formalisée ;
  • agréée par les autorités compétentes ;
  • constituée d’au moins deux hôpitaux ;
    • agréés distinctement au moment de la création du réseau ;
    • qui se trouvent dans une zone géographiquement continue ; et
    • qui proposent des missions de soins locorégionales de manière rationnelle et complémentaire.  

Cette obligation de collaboration en réseaux hospitaliers résulte de la loi du 28 février 2019 « modifiant la loi coordonnée du 10 juillet 2008 sur les hôpitaux et autres établissements de soins, en ce qui concerne le réseautage clinique entre hôpitaux ».

Pour davantage d’informations relatives à l’entrée en vigueur de cette loi, on renverra aux actualités publiées les 15 et 25 novembre 2019.

La mise en œuvre de l’obligation de rejoindre un réseau locorégional

Le paysage hospitalier belge a été découpé en plusieurs réseaux locorégionaux :

  • 8 réseaux en Région wallonne – dont 7 agréés par la Région wallonne et 1 par la Communauté germanophone et par la Région wallonne ;
  • 13 réseaux en Région flamande – tous agréés par la Communauté flamande ;
  • 4 réseaux en Région de Bruxelles-Capitale – dont 3 agréés par la COCOF et/ou la CGG et/ou la Communauté française et/ou la Région wallonne et 1 agréé par la Communauté flamande.

Dans ce cadre, plus de 100 hôpitaux ont dû s’entendre afin de se répartir au sein de ces 25 réseaux locorégionaux.

On aurait dès lors pu s’attendre à un certain « remue-ménage »… Pourtant, la répartition des hôpitaux en réseaux ne semble pas avoir donné lieu à un contentieux important.

On pointe tout de même un arrêt du Conseil d’État n°258.509 du 19 janvier 2024 qui concerne directement le processus de constitution de réseaux hospitaliers locorégionaux.

L’arrêt du Conseil d’État n°258.509 du 19 janvier 2024

L’objet du litige

Le litige fait suite à la décision de l’ADP ASSOCIATION POUR L’EXPLOITATION DE LA CLINIQUE REINE ASTRID DE MALMEDY (le CHRAM) de rejoindre un réseau en cours de formation plutôt qu’un autre réseau également en cours de formation.

Un des hôpitaux du réseau délaissé, L’ASBL GROUPE SANTÉ CHC (le CHC), a introduit un recours auprès du Conseil d’État dans le but d’obtenir la suspension puis l’annulation de cette décision.

(N.B. : La CLINIQUE SAINT-JOSEF DE SAINT-VITH, qui fait partie du même réseau que celui du CHC, a introduit un recours identique. A notre connaissance, aucun arrêt n’a été rendu dans le cadre de la procédure d’annulation. Dans le cadre de la procédure en suspension, le Conseil d’État a considéré que la Clinique Saint-Josef n’avait pas intérêt au recours car la proposition de rejoindre le réseau n’émanait ni d’elle, ni du réseau en devenir, mais du CHC).

La décision du Conseil d’État

Si le Conseil d’État n’a pas fait droit à la demande de suspension (en raison du défaut d’urgence), il a néanmoins procédé à l’annulation de la décision du CHRAM de ne pas rejoindre le réseau locorégional dont le CHC fait partie.

En effet, dans son arrêt n°258.509 du 19 janvier 2024, le Conseil d’État constate que le conseil d’administration du CHRAM était composé de membres illégalement désignés et que la décision qu’ils ont adoptée devait dès lors être annulée.

L’intérêt principal de cet arrêt par rapport aux réseaux locorégionaux réside dans l’examen de la recevabilité du recours.

Au moment de l’introduction du recours, aucun des deux réseaux locorégionaux auxquels le CHRAM aurait pu se joindre n’existait. On se trouvait encore dans la phase précontractuelle précédant la constitution de ces réseaux. Se posait dès lors la question de savoir si la décision par laquelle un hôpital décide de rejoindre un réseau en cours de formation est susceptible de recours au Conseil d’État ou s’il s’agit, au contraire, d’un acte préparatoire ne modifiant pas encore l’ordonnancement juridique.

Dans la mesure où le CHC a introduit ce recours isolément des autres membres du réseau en devenir, la question de son intérêt se posait également.

Le Conseil d’Etat considère que le CHC a un intérêt au recours et que la décision attaquée est une décision susceptible de recours en ce qu’une telle décision :

  • constitue un acte administratif produisant des effets juridiques – et non pas un acte préparatoire – qui s’analyse « en la décision unilatérale d’une autorité administrative par laquelle celle-ci choisit un partenaire pour mener conjointement une opération contractuelle dans un stade ultérieur, en l’occurrence l’opération d’ériger un réseau hospitalier clinique locorégional » ;
  • produit des effets juridiques causant directement grief à la partie requérante qui subit « la perte d’un partenaire contractuel pour le projet de formation d’un réseau hospitalier clinique locorégional, au profit d’un réseau concurrent ». 

Quel avenir pour les réseaux ?

Les hôpitaux ont en principe désormais intégrés des réseaux locorégionaux.

Il reste à savoir si la réglementation évoluera afin de tenir compte de cette nouvelle structuration du paysage hospitalier ou si, au contraire, les hôpitaux se trouveront face à une « coquille vide ». 

Certes, l’arrêté royal du 23 novembre 2022 « qualifiant les missions de soins suprarégionales et les missions de soins locorégionales des réseaux hospitaliers cliniques locorégionaux et déterminant l’offre géographique des missions de soins locorégionales des réseaux hospitaliers cliniques locorégionaux » donne quelques indications utiles. Mais, plus de 5 années après l’entrée en vigueur de la réforme, on demeure dans l’attente d’autres éclaircissements.

Il faudra probablement attendre l’issue des élections et la constitution des futurs gouvernements pour savoir ce qu’il en adviendra…

Pour toute question relatives aux réseaux locorégionaux ou plus largement, au droit de la santé, n’hésitez pas à prendre contact avec Manon MARTIN et Fabien Hans.