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Evaluation des incidences sur l’environnement : la Cour constitutionnelle annule le mécanisme d’abrogation de plein droit de certains anciens PCA

Une personne se tient debout sur un toit en verre, surplombant un vaste paysage de montagnes. Vêtue d'une veste et d'un chapeau rouges, elle tient un casque. Le ciel est partiellement recouvert de nuages et des plaques de neige parsèment le sol. La scène invite à une évaluation sereine des incidents, profondément contemplative dans sa beauté.

L’obligation d’évaluation des incidences environnementales des plans-programmes

Les règles de base en matière d’évaluation des plans-programmes couverts par la directive 2001/42/CE relative à l’évaluation stratégique environnementale ont été présentées à l’occasion de deux précédents articles (ici et ici). Pour rappel, afin d’assurer l’effectivité de la réglementation, la Cour de justice de l’Union européenne lui donne une interprétation large. Elle a ainsi jugé que l’obligation de procéder à une évaluation des incidences d’un plan-programme ne s’imposait pas qu’à l’occasion de l’adoption d’un plan-programme mais tout autant à sa modification ou à son abrogation (arrêt Inter-Environnement Bruxelles, n°567/10 du 22 mars 2012)

L’évaluation des incidences lors de l’abrogation des schémas dans le CoDT

Lors de l’adoption du CoDT, le législateur wallon a souhaité instaurer des « facilités » pour abroger les schémas qui ont fait leur temps.

Dans un premier temps, son intention a été de limiter la validité des schémas dans le temps à une durée de dix-huit ans à dater de la publication par extrait au Moniteur belge de leur décision d’approbation, éventuellement prorogeable une seule fois pour une durée de six ans.

Dans son avis du 15 juin 2015, la section de législation du Conseil d’Etat lui a toutefois clairement fait savoir que de tels mécanismes étaient contraires aux obligations découlant la directive 2001/42/CE relative à l’évaluation stratégique environnementale mais également aux dispositions de la Convention d’Aarhus, relative à l’information, à la participation du public et à l’accès à la justice en matière d’environnement.

Le législateur wallon a alors revu sa copie et a remplacé l’abrogation de plein droit de tous les schémas par une présomption d’obsolescence des objectifs de ces derniers, visée à l’article D.II.15, § 5. du CoDT, qui précise les règles d’abrogations des schémas.

L’article D.II.66 du CoDT contient néanmoins encore un mécanisme d’abrogation de plein droit en raison de l’écoulement du temps de certains anciens plan communaux d’aménagements (PCA) qui, en application de son §1er, sont devenus des Schéma d’orientation local (SOL).

Ainsi, à l’occasion d’un arrêt n°246.688 du 16 janvier 2020, le Conseil d’État a été amené à se pencher sur la régularité du mécanisme instauré à l’article D.II.66, § 4 du CoDT .

Dans cet arrêt, le Conseil d’État constat que « l’ancien P.C.A., devenu SOL, doit être considéré comme un plan et programme au sens de la directive 2001/42/CE et que, en principe, une procédure d’abrogation d’un tel plan entre dans le champ d’application de cette directive, de sorte qu’elle est notamment soumise aux règles relatives à l’évaluation des incidences sur l’environnement prévues par ladite directive ».

Le Conseil d’Etat estime que la régularité du mécanisme d’abrogation de plein droit, institué par l’article D.II.66, § 4 du CoDT, semble aller à l’encontre des dispositions de la directive 2001/42/CE et pose dès lors une question préjudicielle.

L’arrêt de la Cour constitutionnelle

A l’occasion d’un arrêt n°75/2021 du 20 mai 2021, la Cour constitutionnelle a notamment jugé que :

  • La procédure d’abrogation de plein droit décrite à l’article D.II.66, §4 du CoDT n’inclut pas d’obligation de réaliser une évaluation environnementale conforme aux articles 3 à 6 de la directive 2001/42/CE (considérant B.15.1).
  • L’article D.II.66, §4 du CoDT ne prévoit pas de mécanisme permettant aux autorités concernées d’apprécier, au cas par cas, si les plans visés sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement (B. 15.3.).
  • Le législateur wallon ne pouvait pas considérer que, de manière générale, tous les plans susceptibles de relever de l’article D.II.66, §4 du CoDT concerneraient des petites zones au niveau local ou n’emporteraient que des modifications mineures à d’autres plans ou programmes au sens de l’article 3, §2 de la directive 2001/42/CE (B.15.6. et B.15.7.).

La Cour constitutionnelle parvient donc à la conclusion que l’article D.II.66, §4 du CoDT est incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 3 à 6 de la directive 2001/42/CE, en ce qu’il exempte l’abrogation de plein droit des plans qu’il vise, d’une évaluation environnementale au sens de l’article 2, point b) de cette directive.

Un tel constat parait transposable aux PCA devenus SOL visés à l’article D.II.66, §2 à propos duquel la Cour constitutionnelle n’était pas interrogée.

Les conséquences de cet arrêt

Lorsqu’une commune a l’intention d’abroger un SOL, elle devra toujours – même si ce SOL est un ancien PCA adopté avant le 22 avril 1962 ou avant l’entrée en vigueur du plan de secteur –, examiner s’il ne concerne qu’une petite zone au niveau local ou si son abrogation n’emporterait que des modifications mineures à d’autres plans ou programmes.

Si à l’issue de son examen, il apparaît que le projet d’abrogation ou de modification du SOL ne relève pas d’un des cas de figure, l’opération devra alors être précédée d’une évaluation des incidences conformes aux articles 3 à 6 de la Directive 2001/42/CE et à une procédure de participation du public.

Vous avez une question concernant les les évaluations des incidences sur l’environnement des projets ou des plans-programmes ou en matière de droit de l’environnement au sens large ? N’hésitez pas à contacter Me Alexandre PATERNOSTRE ou Me Fabien HANS.