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Comment accéder à un document administratif ?

Une personne en costume tient une grande pile de dossiers ou de documents marron attachés dans un bureau, avec des bureaux et des fournitures de bureau visibles en arrière-plan.

Le droit d’accès aux documents administratifs : un droit fondamental

L’article 32 de la Constitution garanti à chacun le droit de consulter tout document administratif et de s’en faire remettre copie.

Le tribunal civil d’Anvers l’a rappelé dans un jugement du 2 octobre 2024 : l’article 32 de la Constitution a un effet direct. Un citoyen peut donc l’invoquer directement à l’égard de l’autorité et en demander la mise en œuvre par le tribunal, sans devoir se référer à une législation particulière régissant son application.

Lorsque ce droit relève de leur champ d’application, différentes législations viennent toutefois en préciser les conditions concrètes d’exercice.

Diverses législation encadrent le droit d’accès aux documents administratifs

Les diverses entités qui composent l’État fédéral ont adopté des normes juridiques, dans le cadre de leurs compétences et sur leurs territoires, afin d’encadrer ce droit et d’établir des règles de procédure pour sa mise en application.

Au niveau fédéral, la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration s’applique à toutes les matières. Elle est complétée par une loi du 5 août 2006 relative à l’accès du public à l’information en matière d’environnement qui concerne l’accès du public à l’information en matière d’environnement, entendu au sens large.

En Région wallonne, le législateur wallon a adopté un décret du 30 mars 1995 qui fixe les conditions d’exercice et les limites de ce droit d’accès aux documents administratifs. Au niveau des provinces et des communes wallonnes, les articles L 3211-1 et suivants du Code de la démocratie locale et de la décentralisation apportent des précisions complémentaires. De même, le Livre 1er du Code de l’Environnement, notamment les articles D.10 à D.20.18, régit l’accès à l’information en matière environnementale.

A Bruxelles, la Région de Bruxelles-Capitale, la Commission communautaire commune et la Commission communautaire française ont adopté des décrets et ordonnances conjoints en date du 16 mai 2019, relatifs à la publicité de l’administration dans les institutions de la Région de Bruxelles-Capitale.

En revanche, la Communauté française applique toujours le décret du 22 décembre 1994 relatif à la publicité de l’administration. La Communauté germanophone encadre ce droit par un Décret du 16 octobre 1995 relatif à la publicité des documents administratifs et en Flandre, les articles II.26 à II. 88 du Décret flamant de gouvernance du 7 décembre 2018 y sont consacrés.

Les règles encadrant la transparence administrative varient, parfois de manière plus ou moins significative, selon l’entité à laquelle appartient l’autorité administrative concernée.


En quoi consiste le droit d’accès aux documents administratifs?

Ce droit fondamental vise, d’une part, à garantir la transparence et le contrôle démocratique des actions des autorités administratives. Il permet, d’autre part, aux administrés d’accéder à tout document pouvant leur être utile dans la défense de leurs intérêts.

Ainsi, la transparence administrative comprend deux pôles :

  • La « Publicité active » : les autorités doivent mettre en places une politique organisée de communication et d’information ;
  • La « Publicité passive » : les autorités administratives doivent répondre à toute demande d’accès à un (des) document(s) administratif(s) adressée par toute personne physique ou morale.

En vertu de ce deuxième pôle, un administré peut demander l’accès à toute information, sous quelque forme que ce soit, dont dispose l’autorité administrative.

L’obligation de transparence s’applique aux autorités administratives et au-delà

L’obligation de transparence administrative s’impose à toutes les autorités administratives, au sens large.

Dans un arrêt du 20 mars 2025, la Cour constitutionnelle (n° 51/2025) a précisé que certaines instances non administratives, telles que les assemblées législatives, la Cour des comptes, la Cour constitutionnelle, le Conseil d’État, et les juridictions administratives, sont soumises à la publicité administrative lorsqu’elles adoptent des documents de nature administrative, c’est-à-dire ne relevant pas de leurs fonctions législatives ou juridictionnelles.

La demande d’accès aux documents doit être formulée par écrit auprès de l’autorité qui détient le document. Le demandeur doit préciser clairement la matière concernée et, si possible, les documents visés, et, en cas de documents à caractère privé, inclure la preuve de l’intérêt du demandeur

L’autorité peut-elle s’opposer à la publicité du document ?

Le droit d’accéder aux documents administratif n’est pas absolu. En effet, le législateur a prévu la possibilité, voire l’interdiction, de faire droit à cette demande d’accès dans certaines circonstances. Il y a donc des exceptions à ce droit de transparence administrative qui sont admises sous réserve du respect des conditions fixées par une loi, une ordonnance ou un décret.

Une entité ne peut refuser la publicité que dans la mesure où elle peut se baser sur l’un des motifs d’exception visés par les législations applicables et motiver sa décision de manière concrète et suffisante.

Dans son jugement du 2 octobre 2024, le tribunal d’Anvers juge que les règlements des ordres des avocats et de leurs organes, même s’il s’agit de textes confirmés par un arrêté royal, ne peuvent donc pas créer une exception juridiquement valable au principe d’accès aux documents administratifs. Au vu de l’effet direct de l’article 32 de la Constitution, il appartient donc aux tribunaux de délimiter le contenu du droit d’accès aux documents administratifs.

Ainsi, une instance administrative saisie d’une demande d’accès à un document administratif doit vérifier, au regard des normes législatives émanant de différents niveaux de pouvoir, si une exception à la publicité est applicable.

Catégories d’exceptions au droit d’accès

Ces normes prévoient trois catégories d’exceptions que peuvent avancer les autorités pour refuser l’accès aux documents :

  1. Les exceptions dites obligatoires et absolues. L’autorité doit notamment s’oppose à publier ou à transmettre un document si celui-ci porte atteinte à la vie privée, à une obligation de secret imposée par la loi ou encore à la procédure d’un procès civil ou administratif et à la possibilité pour toute personne d’être jugée équitablement (cf. notamment article 6 §2 loi du 11 avril 1994).
  2. Les exceptions obligatoires et relatives. Les législations applicables prévoient également que l’autorité doit rejetter la demande d’accès à des documents administratifs lorsque l’intérêt de la publicité ne l’emporte pas sur la protection d’autres intérêts comme la sécurité de la population, la recherche ou la poursuite de faits punissables ou encore les libertés et les droits fondamentaux des administrés (cf. notamment article 6 §1er loi du 11 avril 1994).
  3. Les exceptions facultatives. L’autorité peut s’opposer à l’accès à des documents si par exemple le document peut faire l’objet de méprise en raison de son caractère inachevé ou incomplet ou bien si la demande est manifestement abusive ou formulée de manière manifestement trop vague (cf. notamment article 6 §3 loi du 11 avril 1994).  

Quelle que soit leur catégorie, les motifs d’exception doivent être interprétés de manière restrictive. Il est en effet de jurisprudence constante que les dispositions dérogatoires s’interprètent toujours strictement et cela vaut a fortiori lorsqu’il s’agit de déroger à un droit fondamental.

Est-il possible de faire un recours contre un refus de communiquer un document?

En cas de refus de consultation, de communication ou même de rectification d’un document administratif, les citoyens disposent de recours devant une Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) et si nécessaire devant une juridiction.

Recours devant une CADA

Un organe a été spécifiquement institué pour examiner les cas dans lesquels un demandeur n’a pas obtenu satisfaction à sa demande d’accès, de consultation, de rectification ou de réutilisation de documents administratifs : la Commission d’Accès aux Documents Administratifs, dite « CADA ».

L’ensemble des entités fédérées – à l’exception de la Communauté germanophone – ainsi que l’État fédéral ont prévu la possibilité de contester une décision négative en matière d’accès aux documents administratifs devant une CADA. Pour déterminer laquelle de ces commissions est compétente, il convient de se référer à l’administration initialement saisi et au le texte législatif qui encadre l’accès au document demandé.

Par exemple, en cas de refus concernant un document émanant du SPF Finances, c’est la CADA fédérale qui sera compétente. En revanche, si le refus émane de la commune de Morlanwelz, la compétence reviendra à la CADA de la Région wallonne.

Ces CADA disposent de plusieurs pouvoirs.

Pouvoir d’avis de la CADA

Lorsqu’un citoyen souhaite contester une décision d’une autorité administrative, il peut introduire une demande de reconsidération auprès de l’autorité. Le demandeur doit accompagner sa demande d’une sollicitation d’avis adressée à la CADA compétente. L’administration réexamine alors sa décision en tenant compte de l’avis rendu par la CADA, avant de notifier sa nouvelle décision au demandeur.

Pouvoir de réformation de la CADA

Certaines CADA exercent aussi un pouvoir de réformation. Elles remplacent la décision de l’autorité administrative par la leur et communiquent elles-mêmes au demandeur le document demandé si l’autorité administrative interrogée s’y refuse. Tel est notamment le cas de la CADA wallonne et de la CADA bruxelloise.

Recours juridictionnels

Les justiciables peuvent également contester les décisions des autorités administratives et des CADA par la voie d’un recours juridictionnel. Le droit d’accès est un droit subjectif de nature politique, qui peut faire l’objet d’un recours devant le juge judiciaire ou le Conseil d’État, selon les circonstances.

Devant le juge judiciaire

Comme le précise le jugement rendu par le tribunal d’Anvers le 2 octobre 2024, un justiciable peut introduire un recours devant le juge judiciaire pour protéger son droit subjectif d’accès aux documents administratifs. En l’espèce, l’instance détentrice des documents ne relevait pas du champ d’application de ces normes législatives, ce qui faisait qu’un recours préalable devant une CADA n’était ni possible ni obligatoire.

Le justiciable peut dès lors, dans certains cas, demander au juge de mettre fin à une situation illégale préjudiciable, notamment en prononçant, le cas échéant, des injonctions à l’administration.

Devant le Conseil d’État

Le Conseil d’État ne se prononce que sur des décisions définitives, non susceptibles de recours. Ainsi, un justiciable ne peut saisir le Conseil d’Etat qu’après avoir reçu une décision de l’autorité faisant suite à une demande de reconsidération ou, lorsque la législation le prévoit, une décision de la CADA statuant en réformation. Si le Conseil d’État annule cette décision, l’autorité devra, dans la plupart des cas, se prononcer à nouveau en tenant compte des enseignements de son arrêt.

Conclusion

Les législateurs reconnaissent le droit d’accès aux documents administratifs comme un droit fondamental, mais ils en limitent l’exercice au moyen d’exceptions prévues par un texte de valeur législative

En cas de refus d’accès (total ou partiel), des recours sont possibles, notamment auprès des commissions compétentes, telles que la CADA, puis éventuellement devant le Conseil d’État. Par ailleurs, un recours devant le juge judiciaire est possible dans certains cas spécifiques, permettant ainsi aux citoyens de défendre leur droit d’accès lorsque d’autres voies de recours ne sont pas applicables.

Si vous vous posez des questions sur le droit d’accès aux documents administratifs, ses modalités d’application, les exceptions possibles et les recours disponibles pour défendre ce droit, n’hésitez pas à nous contacter.


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